La sanction, première des préventions: Comment s’assurer qu’elle est appliquée?

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La sécurité des Français est une priorité pour notre majorité. Pour la garantir,
le système judiciaire et pénitentiaire doit être irréprochable. Chaque sanction prononcée doit être appliquée. Or à ce jour, plus de 80 000 peines ne sont pas exécutées, notammentà cause d’un manque de places de prison. L’efficacité et la crédibilité de la justice sont menacées. Quelles solutions pour faire appliquer les peines prononcées
?

CONSTAT
Au début de l’année 2009, on comptait environ 127 000 peines de prison non exécutées dont :
- Pour 45 000 peines, la non-exécution s’explique par des motifs juridiques (en particulier parce que le condamné ne s’est pas présenté à son procès et n’a pu se voir signifier sa peine ; on dit alors que la peine est « non exécutoire ») ;

- Pour 82 000 peines soit 13 % des peines de prison ferme, la non-exécution n’a aucun motif juridique valable (on dit alors qu’il s’agit de « peines exécutoires ») : les peines courtes sont prépondérantes, puisque les peines inférieures ou égales à six mois représentent 70 % du stock total et celles inférieures ou égales à un an 90 %. De plus, l’exécution des peines d’emprisonnement tend à se dégrader : En 2005, la moitié des peines d’emprisonnement ferme qui étaient prononcées étaient mises à exécution la première année. En 2009, cette proportion est tombée à seulement 42,6 % des peines d’emprisonnement ferme prononcées exécutées la première année

Cette situation constitue un mauvais signal envoyé aux délinquants, qui peuvent avoir le sentiment de l’impunité.


La dénaturation des peines prononcées par les juges

En raison notamment de la surpopulation carcérale et depuis la loi du 24 novembre 2009, toute personne condamnée à une peine inférieure ou égale à deux ans de prison ferme peut voir sa peine « aménagée » par le juge de l’application des peines (JAP). Cependant, on constate que les délais de traitement des JAP sont très longs (supérieurs aux 4 mois définis par la loi). La loi prévoit que le parquet est censé mettre à exécution, au bout de 4 mois, toutes les peines de prison sur lesquelles le JAP n’a pas eu le temps de se prononcer. Or, cette disposition est rarement respectée. Par ailleurs, on peut s’interroger sur l’utilité, voire la légitimité d’un recours systématique au juge d’application des peines, alors que le tribunal est le mieux placé pour prononcer la peine adéquate. Pourquoi rejuger un cas alors qu’il a déjà été jugé publiquement et en présence de la victime ?


L’aménagement des peines en quelques chiffres (source : ministère de la Justice)

- 16,3 % des condamnés écroués bénéficient d’un aménagement de peine (contre 14,4 % au
1er janvier 2010) soit 8 344 personnes qui bénéficient d’un aménagement de peine sous écrou au 1er janvier 2011 dont :
- 5 767 placements sous surveillance électronique 4 489 au 1er janvier 2010
- 1 554 placements en semi-liberté (SL)
- 1 023 placements à l’extérieur (PE), soit + 30,5 %.

- 48 placements sous surveillance électronique mobile au 1er janvier 2011


Surpopulation carcérale

Depuis 2008, le taux de surpopulation carcérale ne cesse de diminuer même s’il reste encore trop important. Au 1er janvier 2011, le taux d’occupation des centres pénitentiaires était de 107,4 %.
Au total, à cette date, 60 544 personnes étaient écrouées et détenues pour 56 358 places. Cependant, les projections de population sous écrou effectuées par l’administration pénitentiaire aboutissent à la prévision de 71 000 détenus en 2012 et de 80 000 en 2017. La construction de nouvelles places de prison est donc nécessaire.

Ainsi, afin de pouvoir appliquer les peines prononcées par les juges, il nous faudrait 20 000 places supplémentaires d’ici à 5 ans.


Un taux de détention français inférieur à la moyenne européenne

Il est important de rappeler que la France, avec 95 détenus pour 100 000 habitants, se situe aujourd’hui dans la moyenne basse des pays européens, la moyenne européenne étant de 122. De plus, parmi les 27 États-membres de l’UE, 20 États ont un taux de détention supérieur à celui de la France. Ainsi, si le parc carcéral français atteignait les 80 000 places (soit 130 places pour 100 000 habitants), la France ne ferait que rejoindre les nombreux pays (Espagne, Portugal, Royaume-Uni) connaissant un taux de détention situé entre 110 et 150 pour 100 000 habitants. Nous serions encore bien loin de la situation des États-Unis, peu enviable, dans laquelle plus de 700 personnes sur 100 000 habitants sont détenues.


Les réductions de peine

Une réduction de peine est une décision du JAP qui dispense le condamné de l’exécution d’une partie de sa peine privative de liberté. Il y a deux types de réductions de peine : les ordinaires et les supplémentaires.
Pour les réductions de peine ordinaires, l’article 721 du Code de procédure pénale prévoit que :

« Chaque condamné bénéficie d’un crédit de réduction de peine calculé sur la durée de la condamnation prononcée à hauteur de trois mois pour la première année, de deux mois pour les années suivantes et, pour une peine de moins d’un an ou pour la partie de peine inférieure à une année pleine, de sept jours par mois ; pour les peines supérieures à un an, le total de la réduction correspondant aux sept jours par mois ne peut toutefois excéder deux mois.

Lorsque le condamné est en état de récidive légale, le crédit de réduction de peine est calculé à hauteur de deux mois la première année, d’un mois pour les années suivantes et, pour une peine de moins d’un an ou pour la partie de peine inférieure à une année pleine, de cinq jours par mois ; pour les peines supérieures à un an, le total de la réduction correspondant aux cinq jours par mois ne peut toutefois excéder un mois. » (…)

En ce qui concerne les réductions de peine supplémentaires, l’article 721- 1 du Code de procédure pénale prévoit que : « Une réduction supplémentaire de la peine peut être accordée aux condamnés qui manifestent des efforts sérieux de réadaptation sociale, notamment en passant avec succès un examen scolaire, universitaire ou professionnel traduisant l’acquisition de connaissances nouvelles, en justifiant de progrès réels dans le cadre d’un enseignement ou d’une formation, en suivant une thérapie destinée à limiter les risques de récidive ou en s’efforçant d’indemniser leurs victimes (…) »

« Cette réduction (…) ne peut excéder, si le condamné est en état de récidive légale, deux mois par année d’incarcération ou quatre jours par mois lorsque la durée d’incarcération restant à subir est inférieure à une année. Si le condamné n’est pas en état de récidive légale, ces limites sont respectivement portées à trois mois et à sept jours. » (…)


Sanctions alternatives et aménagements de peine : pas de solution miracle

Lorsque le condamné ne présente pas de danger pour la société, il y a parfois des alternatives à la prison :

- les peines pécuniaires ou amendes,
- les peines probatoires : le condamné n’est pas incarcéré mais il doit respecter un certain nombre d’obligations : suivre des soins, avoir un travail ou une formation, rendre compte régulièrement au juge d’application des peines…,
- les travaux d’intérêt général (TIG),
- les interdictions de fréquenter certains lieux,
- des stages de citoyenneté,
- des dispositifs de semi-liberté…
Les juges peuvent également avoir recours aux aménagements de peine comme la libération conditionnelle, le placement à l’extérieur, le placement sous surveillance électronique (avec des bracelets)… 20% des condamnés bénéficient de ces aménagements. Ces dispositifs sont difficiles à mettre en oeuvre et ne peuvent pas concerner tous les condamnés ! Ainsi, le placement sous surveillance électronique mobile (PSEM), plus souvent appelé bracelet électronique mobile, qui a été introduit en droit français par la loi du 12 décembre 2005 relative au traitement de la récidive des infractions pénales, ne concerne aujourd’hui que 48 personnes !

Par ailleurs, il est nécessaire d’assurer un suivi un rigoureux par les SPIP (Services Pénitentiaires d’Insertion et de Probation) pour s’assurer que les peines sont bien exécutées et que la société est bien protégée. Enfin, en ce qui concerne l’organisation des services de l’application des peines, il faudrait parvenir à recréer une synergie entre les JAP et les SPIP qui n’est actuellement pas satisfaisante depuis la réforme des SPIP en 1999.

L’exemple des TIG :
Les travaux d’intérêt général (TIG), qui ont connu un développement important depuis 2004, connaissent des difficultés de mise à exécution.

Une étude réalisée en mai 2010 a mis en évidence que près de 60 % des tribunaux de grande instance n’ont pas pu mettre à exécution des travaux d’intérêt général pour des raisons non imputables au condamné : délai d’exécution trop court, absence de travail d’intérêt général disponible, etc.2. Non seulement le nombre de postes proposés pour des TIG est insuffisant mais surtout, les communes et les associations ne disposent pas de l’encadrement nécessaire à l’accueil d’un condamné. De plus, les collectivités locales posent des critères stricts quant à la nature de l’infraction ou au profil du condamné.


La récidive

Il existe aujourd’hui 19 000 individus qui ont plus de 50 mentions au Système de Traitement des Infractions Constatées (STIC), c’est-à-dire qu’ils ont été arrêtés plus de 50 fois par la police. Ils ont en général au moins une dizaine de condamnations à leur casier judiciaire et ils présentent un risque de récidive très élevé. Pour ces individus, la peine de prison ne suffira pas. Il faut trouver des moyens pour les suivre après leur sortie de prison tel que le bracelet électronique mobile qui n’est quasiment pas utilisé actuellement (seulement 48 personnes sont concernées).

Depuis 3 ans, le Gouvernement a mené une politique judiciaire et pénitentiaire ambitieuse, découvrez toutes les actions dans cet article.

Téléchargez le document complet sur l’application des peines.

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Vos commentaires

27 commentaire(s) | Afficher tous les commentaires

  1. Publié le 12 mars 2011 à 22 h 36 min par ruis

    ne surtout pas reduir les peines s’ils mANQUENT DE PLACE placer les jeunes délinquants en correctionnels les récidiviste peine de mors pour les enfants les femmes et les personnes agées surtout ne pas leurs placer danskeur chambres ni tele ni quoi ce soit qui leurs permettrait d être mieux que dehors punir punir vraiment et certainsq les renvoyer dans leus pays d orines un point c est tout

  2. Publié le 12 mars 2011 à 18 h 13 min par ELISE Michel

    Je propose de mettre fin à ce que j’appelle les <>:
    -1- Supprimer la « confusion des peines »
    -2- Lorsque qu’une personne est jugée après avoir commis plusieurs crimes, délies; qu’il soit prononcé une peine par acte .
    Par exemple 3 viols, ce n’est pas 1 viol !!! Donc 3 peines cumulatives.
    Est ce que si l’on prend plusieurs PV ( en temps qu’automobiliste), on est « quitte » en en payant 1 seul ???

  3. Publié le 12 mars 2011 à 9 h 11 min par Tendron

    la non-exécution des peines parceque le condamné ne s »est pas présenté,c’est aberrant,au contraire il faut doubler la peine.Si les peines étaient plus fortes et appliquées il y aurait moins de délinquints.!!!!!

  4. Publié le 11 mars 2011 à 0 h 32 min par VIBERT

    On manque de places de prisons….et on a pas le temps et pas les moyens d’en construire d’autres, alors:
    -Envoyons les étrangers purger leur peine dans leur pays d’origine
    -pour les peines de longue durée, pratiquons la délocalisation.On envoi a l’étranger des fabrications ou des travaux qu’on ne peut pas faire en France a cause des couts de production, la garde d’un détenu est une activité tertiaire qui aura certainement des intéréssés a le faire a un cout très inférieur au notre Moi je veux pas payer d’impots pour construire des prisons !!!!!

    -Pour les petites peines, utilison les casernes désafféctées ou les camps d’entrainement militaires, c’était bon pour les jeunes Français, pourquoi ça ne le serait pas pour les déliquants, et pour ces petites peines, la discipline remplacerait les murs et les miradors…Tout le monde serait gagnant

  5. Publié le 10 mars 2011 à 9 h 19 min par PAILLET-PETIT

    Comment ne pas avoir besoin de plus de personnes dans les tribunaux quand on voit la complexité du droit français ne serait ce que pour aborder la remise de peine ? Le législateur a multiplié
    à souhait la difficulté d’appliquer une peine définitive, on s’est pris
    tellement les pieds dans le tapis que Résultat : plus assez de personnels dans les Tribunaux pour faire appliquer la loi ou les lois, les avocats des plaignants usent et abusent de cette opacité
    qu’ils ont totalement bien « eux » digérés, et des délinquants se retrouvent libres ……

  6. Publié le 10 mars 2011 à 2 h 03 min par ordo ab chaos

    S’il est certain que l’application des peines prononcées est un problème sociétal important, il convient de le remettre dans son contexte :
    - la France a une population carcérale qui dépasse les capacités d’accueil, il est donc impossible de créer des « lits » supplémentaires dans un délai court ;
    - les peines alternatives sont déjà développées et déjà prononcées quand le condamné reçoit une peine de 2 ans ou moins
    - les maisons d’arrêt et centres de détention sont les premiers lieux où se créent les récidives (le contact entre détenus est un facteur, il est surdéveloppé entre détenus et prévenus)
    - le placement sous surveillance électronique (le bracelet aux pieds) est sans doute la meilleure alternative pour les peines courtes (moins de 2 ans par exemple) car elle limite la récidive (on ne passe pas son temps à parler entre détenus), elle doit s’accompagner d’un suivi (SPIP, JAP, …)et doit générer un travail sur soi même et un projet de réinsertion.
    - le TIG existe déjà et pourrait être une alternative aux peines très courtes (- de 6 mois par exemple)
    - la peine probatoire me parait trop laxiste, autant mettre un bracelet électronique pour marquer la peine ;
    - les réductions de peine et réductions de peines spéciales devraient être plus individualisées mais le SPIP et les JAP étant déjà débordés, je ne vois pas sur quels critères on pourrait améliorer ce système qui j’ose le croire, favorise le relatif bon comportement des détenus en milieu carcéral (ces réductions sont diminuées ou supprimées en cas de problèmes disciplinaires)

    La limitation de la récidive par le port, après la peine d’un dispositif électronique va a l’encontre de tous nos principes juridiques, un condamné ayant purgé sa peine a réglé ses comptes avec la société.

    Il me paraîtrait intéressant et sans doute utile d’élargir le débat à la rapidité avec laquelle la peine est prononcée.Que signifie en effet une peine qui arrive 3, 4 voire 10 ans après une infraction ?
    Est il normal qu’une instruction puisse durer plus de 2 ans ?

(requis)